Revêtement de sol et destination de l'immeuble : attention aux travaux illégaux!
La déclaration de copropriété contient habituellement des normes à respecter lors de l’installation ou le remplacement du revêtement des planchers des appartements.
On se demande souvent si ces règles sont valides, selon quelle majorité elles peuvent être modifiées par l'assemblée, quelles sont les conséquences d'une contravention, etc. La Cour d'appel du Québec vient de rendre une décision qui vient préciser les règles applicables lorsque la qualité de l'insonorisation dans l'immeuble est en cause.
En copropriété, la notion de « destination de l'immeuble » joue un rôle essentiel tant pour le copropriétaire que pour la collectivité. En effet, la destination de l'immeuble définit l'usage (ou l'affectation) auquel est « destiné » l'immeuble : résidentiel, commercial, mixte, etc. C'est encore cette même notion qui justifie que des limites ou des restrictions soient imposées à tout copropriétaire sur la façon dont il peut exercer ses droits individuels. Par conséquent, la déclaration de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits d'un copropriétaire si celle-ci n'est pas justifiée par la destination de l'immeuble.
La notion de destination de l'immeuble vise aussi certaines autres caractéristiques de la copropriété comme la situation de l'immeuble, la qualité de sa construction, de son insonorisation, etc. Des travaux qui portent atteinte à la destination de l'immeuble sont illégaux.
Toute modification à la déclaration de copropriété qui touche la destination de l'immeuble requiert la double majorité, c.-à-d. le vote des trois quarts des copropriétaires représentant 90 % des voix de tous les copropriétaires (art. 1098 C.c.Q.).
La déclaration de copropriété contient habituellement des règles portant sur l'aménagement des appartements en copropriété. Ces règles sont très importantes puisqu'elles imposent des limites aux copropriétaires. En retour, ces règles protègent l'ensemble des copropriétaires contre des travaux individuels qui pourraient diminuer la qualité de vie de la collectivité.
C'est à cette fin que sont édictées des règles portant par exemple sur l'installation ou le remplacement de revêtement de plancher des appartements. Le plus haut tribunal de la province a dû se prononcer sur certaines questions entourant ce sujet précis. Voyons ce qui en est.
Le 13 juin 2016, la Cour d'appel du Québec a donc rendu un jugement fort intéressant dans l'affaire Velenovsky c. Syndicat des copropriétaires de La Maison Amyot[1].
La Cour reconnaît que l'insonorisation peut constituer un élément clé de l'individualité d'un immeuble, donc de sa destination. Elle est toutefois d'avis qu'il n'y a pas « changement de destination de l'immeuble » chaque fois que le degré d'insonorisation, mesuré par un acousticien, est modifié par un texte ou par des travaux. La Cour retient plutôt l'expression « confort acoustique », laquelle est attestée par les chercheurs et les enseignants en droit.
Ainsi, dans la mesure où le confort acoustique des occupants de l'immeuble est maintenu, il est possible de modifier le règlement de l'immeuble et de faire des travaux sans que la destination de l'immeuble n'en soit affectée. On doit aussi conclure de cette décision de la Cour d'appel que si le confort acoustique de l'immeuble est compromis, il y a bel et bien atteinte à la destination de l'immeuble, ce qui est illégal.
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Lorsqu'un syndicat souhaite préciser les règles entourant la pose de revêtement de plancher dans les appartements, autoriser de nouvelles méthodes ou de nouveaux matériaux, donner des autorisations pour des travaux affectant les parties privatives, contester des travaux entrepris par un copropriétaire, il doit connaître les règles juridiques complexes entourant la destination de l'immeuble et leur application en matière d'insonorisation. Les dirigeants du syndicat ne doivent pas hésiter à demander des conseils juridiques à leur notaire ou à leur avocat et à consulter, au besoin, un acousticien.
[1]2016 QCCA 1026.